Ouverture
Je n’ai jamais pu lire et me satisfaire de la lecture
de «
l’évangile tel qu’il m’a été révélé »
de Maria Valtorta. On y est noyé par une multitude de descriptions et
de détails inutiles qui étouffent
l’oeuvre de l’Esprit
Saint en nous. En revanche
la grande sobriété des
évangiles canoniques est stimulante pour la méditation : elle laisse
la place à une méditation où l’Esprit Saint
va pouvoir nous donner telle ou telle
lumière féconde pour notre
progression en sainteté.
Saint Dominique, avait toujours sur lui uniquement l’évangile selon saint Matthieu,
et les lettres de saint Paul. Il les lisait et les relisait. « Il les étudiait tellement qu’il les savait à peu près par cœur » disent
les actes de sa canonisation. C’est une attitude
mariale, retranscrite ainsi par l’évangéliste saint Luc : « Quant à Marie, elle conservait avec soin toutes ces choses, les méditant en son cœur » (2, 19).
L’Évangile est un petit livre, qu’il nous faut lire, méditer,
manger. « Je pris le petit livre
de la main de l'Ange et l'avalai… Alors on me dit : « Il te faut de nouveau prophétiser contre une foule de peuples,
de nations, de langues et de rois » (Ap 10, 1-11).
Manger le petit livre, c’est recevoir
la Parole de Dieu comme une parole de vie et
une force prophétique. « Les
paroles que je vous ai dites sont esprit et vie » dit Jésus (Jn 6, 63). Manger le petit livre, c’est lire
et relire l’Évangile, pour en tirer toujours quelque chose de nouveau. L’Esprit Saint nous donne toujours des
lumières nouvelles. Du vieux, l’on tire
du neuf (Mt 13, 52).
Et si, précisément, ces poupées gigognes interminables que
sont les livres de révélations
privées (ici, 10 tomes, plus le reste : 7 000, ou plutôt 10 000 pages), étaient le refus et la négation de l’Esprit Saint
lui-même ? Jésus ne dit-il pas : « l’Esprit Saint que le Père enverra en mon
nom, lui, vous enseignera tout, et il vous fera souvenir de tout ce que je
vous ai dit » (Jn 14, 26) ?
C’est à cette réalité-là que nous sommes affrontés
lorsque nous nous posons la question
de l’inspiration de l’oeuvre de Maria Valtorta. Est-ce Jésus qui lui a dicté ? Est-ce sa propre méditation personnelle ? Est-ce un mélange toxique
où l’esprit d’erreur
et de mensonge s’est introduit ?
Ce livret rassemble
trois articles publiés
sur le site sosdiscernement.org. Le premier
est de Céline Hoyeau, journaliste à
la Croix et se fait l’écho des tensions actuelles autour de l’ouvre
de Maria Valtorta.
Le second est le texte de la Commission Doctrinale de la Conférence des
Évêques de France, qui vient de publier
une note, un « bref avertissement » au sujet de la diffusion de l’Évangile tel qu’il m’a été révélé de Maria Valtorta.
Le troisième est une présentation et un aperçu
de trois articles d’analyses
signés Don Guillaume Chevallier, professeur d’exégèse à l’École supérieure de Philosophie et de
Théologie d’Évron (téléchargeables sur le site de la Communauté Saint Martin).
Enfin, vous avez accès
à quatre autres
études :
•
Maxime Lesage, ex-valtortiste repenti, qui nous confie
son cheminement et met en ligne : « Contradictions et hérésies dans l’oeuvre de Maria Valtorta
? »
•
René Gounon propose
de son côté un travail
intitulé : « Maria Valtorta, l’Évangile dévoyé. Des visions et des
messages qui ne peuvent venir de Dieu », téléchargeable également.
•
Joachim Bouflet, qui a publié en 2023 Les
impostures mystiques, consacre un chapitre entier
à Maria Valtorta, dont Damien Bally
se fait écho.
•
Sandra Miesel, médiéviste américaine, soulève la
question extrêmement grave de l’antisémitisme
présent dans le Poème de l’Homme-Dieu.
En lisant tout cela, vous serez en mesure de vous faire une opinion personnelle, et de prendre position de façon
éclairée. Par souci d’objectivité, si vous souhaitez avoir accès à toute la propagande valtortienne, il suffit que
vous tapiez « Maria Valtorta » sur un moteur de recherche pour qu’internet vous la restitue.
Bonne réflexion.
Dominique
Auzenet, mai 2023 Prêtre du diocèse du Mans,
Délégué à la pastorale Nouvelles Croyances et Dérives
Sectaires.
MARIA VALTORTA
I. Le phénomène Maria Valtorta
II. Note de la Commission Doctrinale
III. Trois articles de Don Guillaume Chevallier
L’inspiration
chez Maria Valtorta Évaluation
de trois éléments de doctrine
Aspects psychologiques des personnages
IV. Maxime Lesage, ex-fervent valtortiste
1.
Son témoignage publié
sur le site sosdiscernement.org
2.
Son travail : contradictions et hérésies dans l’oeuvre de Maria Valtorta
?
V. René Gounon : Maria Valtorta,
l’Évangile dévoyé
VI. Joachim Bouflet : les aspects
problématiques
De
nombreux anachronismes La
description des sacrements La personnalité de Jésus
L’entrevue du 26 février
1948 avec Pie XII La personnalité de Maria Valtorta
VII. L’antisémitisme présent dans le Poème
de l’Homme-Dieu
Conclusion : une évaluation négative
I.
Le phénomène
Maria Valtorta entre critiques et défenses passionnées
Céline Hoyeau,
La Croix du 9 octobre 2021
Alors
que les adeptes des écrits de cette mystique italienne célèbrent les soixante ans de sa mort, les évêques ont publié fin septembre un « bref avertissement »
pour rappeler que son œuvre n’a
jamais été reconnue par l’Église comme d’inspiration surnaturelle.
Ce 9 octobre marque le soixantième anniversaire de la
mort de Maria Valtorta (1897-1961), «
mystique » italienne auteur de L’Évangile tel qu’il m’a été révélé. Cette somme de 5 000 pages, une Vie de Jésus
dont l’auteure aurait reçu la révélation au cours de visions, est aujourd’hui un succès de librairie. De nombreux fidèles
affirment trouver de quoi raviver ou approfondir leur foi.
Cette popularité est due aussi aux efforts déployés
depuis plusieurs années par les «
valtortiens », ou fans de la mystique, pour la faire connaître. Ainsi la
Fondation héritière de Maria
Valtorta, qui a encouragé des groupes de lecture dans toute la France et organise ce 9 octobre un
colloque près de Rome. Une vidéo- témoignage du célèbre ténor Andrea Bocelli est au programme. Tout comme un
point sur le recueil de témoignages
en cours mené par un prêtre du vicariat de Rome en vue de plaider pour sa
béatification.
Eclairer les personnes
attirées par ce type de littérature
D’autres valtortiens, l’Association Maria Valtorta, se lancent de leur côté dans une campagne de six mois de conférences en France et prévoient une première retraite spirituelle pour 2022. Depuis
deux ans déjà, cette association promeut des
conférences dans les diocèses, avec pour titre : « Quel est l’avis de l’Église ? » Et pour
sous-titre,
en forme de réponse : « “Publiez l’œuvre
telle qu’elle est !” Pie XII. Le Saint Padre Pio en
conseillait la lecture. Le Saint pape Jean-Paul II lisait
cette œuvre. »
Quel est l’avis de l’Église, justement ? Soucieuse d’« éclairer les personnes attirées par ce type de littérature », la Commission doctrinale de l’épiscopat vient de
publier un
« bref avertissement1
», pour rappeler que L’Évangile tel qu’il m’a été révélé a
été mis à l’Index par décret du
Saint-Office en 1959. Sentence confirmée en 1985 par le cardinal Ratzinger, alors préfet de la
Congrégation pour la doctrine de la foi2, et, en 1992, par la Conférence épiscopale italienne qui demandait
à l’éditeur d’indiquer explicitement que ces écrits ne sont
pas d’origine surnaturelle.
Des lignes rouges franchies
Si l’épiscopat français ne se prononce pas sur le fond, trois
articles publiés dans la revue
théologique de la communauté Saint-Martin3 analysent sous un autre
jour ces écrits. Pour leur auteur,
Dom Guillaume Chevallier, la meilleure connaissance du phénomène des abus aujourd’hui rend « plus avertis que par le passé des “lignes rouges” qu’on
doit trouver étrange de voir franchies ».
Citant longuement L’Évangile
tel qu’il m’a été révélé, il pointe ainsi des traits de personnalité narcissique du Jésus de Maria
Valtorta et relève que celui-ci «
maintient ses disciples dans une
dépendance psychologique surtout affective ». Il questionne aussi ses gestes ambigus, « difficilement explicables même par un contexte
“oriental” », Jésus baisant sur la
bouche Judas ou enlaçant Jean « à peine vêtu ».
Sur le plan doctrinal, il prône la préexistence de
l’âme de Marie, l’incarnation de Satan
en Judas, « mis en parallèle strict avec
l’incarnation du Fils de Dieu », une vision manichéenne éloignée de l’anthropologie chrétienne, ainsi qu’une
compréhension maladroite, pour ne pas
dire déformée, de l’union des deux natures du Christ. Au fond, s’ils semblent répondre à un besoin légitime de se
représenter les événements de
l’Évangile plus concrètement, les écrits de Maria Valtorta risquent à la
longue, selon lui, d’entraîner les fidèles dans des voies spirituelles fausses
et imaginaires.
1 Sur le site du
diocèse de Viviers : ardeche.catholique.fr/information-de-la-cef-concernant-les- ecrits-de- maria-valtorta
2 « Bien qu’aboli
l’Index conserve toute sa valeur morale, c’est pourquoi il n’est pas retenu
opportun de diffuser et de recommander une oeuvre dont la condamnation ne fut pas prise à la légère,
mais sur des arguments
réfléchis afin de neutraliser les dommages qu’une telle publication peut
apporter à la foi des plus démunis ».
3 Communautesaintmartin.org/
la-csm/ecole-superieure-philosophie-theologie/articles-en-libre- acces
La défense des valtortiens
Que ce soit celles de 1959 ou celles d’aujourd’hui, ces prises de position ecclésiales sont vivement contestées par les valtortiens. Selon eux, Pie XII aurait,
« après lecture de l’œuvre complète
», demandé sa publication, mais des pressions du Saint-Office auraient bloqué l’imprimatur. Et, sur le fond, il n’y aurait « rien d’anticatholique » dans ces écrits. « Maria Valtorta a toujours obéi à l’Église,
c’est son confesseur qui lui a demandé de retranscrire ses visions, et ses restes furent d’ailleurs transférés dans une basilique à Florence. Si le Saint Office
avait trouvé une hérésie, il ne se serait pas privé de le dire clairement », souligne Benoît de Fleurac,
chargé de communication de la Fondation héritière.
Céline Hoyeau
II.
Note de la
Commission Doctrinale sur les écrits de Maria Valtorta
BREF AVERTISSEMENT au sujet de la diffusion de l’Évangile tel qu’il m’a été révélé de Maria VALTORTA. 29 septembre 2021
La diffusion des écrits de Maria Valtorta s’intensifie
depuis deux ans au moins. On
rencontre, en plus des fidèles qui se nourrissent de ces textes, des prêtres
qui répandent ces écrits, des groupes de lecture de Maria Valtorta
dont les activités sont à certains endroits annoncées dans les
feuilles paroissiales. Des associations et des
sites internet diffusent
à grande échelle
des mails commentant l’évangile du dimanche par des textes de Maria Valtorta.
Des fidèles de bonne foi supposent que cette œuvre est approuvée par l’Église.
Un jugement
clair du Magistère de l’Eglise a mis à l’Index L’Évangile tel qu’il m’a été
révélé le 16 décembre 1959. La sentence est expliquée dans un article de L’Osservatore Romano du 6 janvier 1960. Elle a été rappelée
par le Cardinal Ratzinger,
alors préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi le 31 Janvier 1985, dans lequel il explique que
: « bien qu’aboli, l’Index conserve toute
sa valeur morale, c’est pourquoi il
n’est pas retenu opportun de diffuser et de recommander une œuvre dont la condamnation ne fut pas prise à la légère,
mais sur des arguments réfléchis afin de neutraliser les dommages qu’une telle publication peut porter à la foi
des plus démunis4. »
4 Un prêtre de l’archidiocèse de Gênes s’adresse à la
CDF par une lettre datée du 18 mai 1984 concernant la position de l’Église sur l’œuvre de Maria Valtorta.
Le cardinal Ratzinger
répond personnellement par une lettre
datée du 31 janvier 1985, à l’archevêque le cardinal Giuseppe
Siri, dont dépend le prêtre
requérant. Voici l’original en italien de la phrase citée : « Benché abolito,
l’Index conservava tutto il suo valore morale,
per cui non si ritiene
opportuna la diffusione e raccomandazione di un’Opera la cui condanna
non fu presa alla leggera
ma dopo ponderate
Mentionnons également
la lettre du 6 mai 1992, par laquelle le secrétaire général de la conférence des évêques
d’Italie a demandé à un éditeur de ne pas publier
les écrits de Maria Valtorta sans indiquer explicitement qu’ils ne sont pas d’origine surnaturelle5.
Le synode des évêques de 2008 sur la Parole de Dieu a
recommandé d’« aider les fidèles à bien distinguer la Parole de Dieu des révélations privées
», dont le rôle
« n’est pas de (…) « compléter » la Révélation définitive du Christ, mais
d’aider à en vivre plus pleinement
à une certaine époque
de l’histoire6 ».
Nous constatons chez certains fidèles de l’Eglise
catholique un intérêt pour les révélations
privées, un goût pour ce qui apparaît nouveau et manifeste l’actualité de la Révélation à travers des grâces
mystiques ou des charismes. Ceci mérite d’être
accompagné par un soin pastoral qui vise, non à éteindre l’Esprit, mais
à éclairer les fidèles sur cette distinction entre Parole de Dieu et révélations privées.
Notre sollicitude pastorale envers les personnes attirées par
ce type de littérature nous conduit à
rappeler une vérité de foi importante : il s’agit de prendre conscience qu’une personne
seule, sans une pleine communion
avec l’Église et ses pasteurs
ne peut se revendiquer dépositaire de l’Évangile ni de la tradition. Car le fruit de la réception de la Parole de Dieu est la communion de l’Église avec le Père et le Fils :
«
Nous vous annonçons la vie éternelle, qui
était auprès du Père et qui nous est apparue : ce que nous avons vu et entendu, nous vous l’annonçons, afin que
vous soyez en communion avec nous et que notre communion
soit avec le Père et avec son Fils Jésus Christ7 ». L’unique « solo
» dans la symphonie de la Création, c’est le Christ8.
« Dieu qui parla jadis ne cesse de converser avec l’Épouse de son Fils bien-aimé, et l’Esprit Saint, par qui la voix vivante de l’Évangile retentit
dans l’Église et par elle dans le
motivazioni al fine di neutralizzare i danni che tale pubblicazione può arrecare ai fedeli piú sprovveduti. »
5 « Je vous demande, dans le cas d’une éventuelle
réimpression des volumes, qu’il soit indiqué
clairement dès les premières pages que les « visions » et les « dictées » auxquelles on se réfère dans ces volumes ne peuvent être reconnues
d’origine surnaturelle, mais qu’elles doivent être considérées simplement comme des formes littéraires
dont l’auteur s’est servi pour conter, à sa manière, la vie de Jésus. » (Dionigi
Tettamanzi, Secrétaire général
de la Conférence Episcopale Italienne, Lettre à l’éditeur, 6 mai 1992)
6 Citation de Benoît XVI, Verbum Domini, n°14
7 1 Jn 1, 2-3
8 Cette réflexion
est inspirée de ce que
dit Benoît XVI, dans Verbum Domini n°
13
monde, introduit les croyants dans
la vérité tout entière et fait que la parole du Christ habite en eux avec toute sa richesse9». La
conversation permanente de la communauté des
fidèles avec Dieu n’est pas ‘’piétiste-individuelle.’’ Il s’agit du
dialogue de Dieu avec l’Épouse du
Christ, la sainte Église. Il émet un écho dans le monde car, par l’Église en qui retentit la Parole du
Christ, Dieu fait entendre au monde la Bonne
Nouvelle. Cette expérience ecclésiale de la Révélation se vérifie
également du fait qu’elle oriente
vers le Christ et qu’elle
fait de l’Église un vecteur
de la Bonne Nouvelle du Salut
pour le monde d’aujourd’hui.
La constitution dogmatique Dei Verbum explicite les divers modes par lesquels se poursuit ce dialogue de Dieu avec
l’Église. Ils ne se limitent jamais au sentiment individuel ou à la pensée personnelle de tel ou tel fidèle du
Christ. Sous l’assistance du
Saint-Esprit, la connaissance par l’Église des objets de la foi s’accroît « soit par la
contemplation et l’étude
des croyants[…],soit par l’intelligence intérieure qu’ils éprouvent des choses spirituelles, soit par la
prédication de ceux qui, avec la succession épiscopale, reçurent un charisme certain de vérité10 ».
Les soifs spirituelles que nous pouvons observer dans
le Peuple de Dieu méritent d’être prises au sérieux et le besoin de lecture, de nourriture vivante pour favoriser
la ferveur et la contemplation du mystère du Christ sont un encouragement à continuer à écouter,
avec toute l’Église, la parole du Seigneur, et à annoncer les vérités
de la foi avec ferveur et
enthousiasme.
Notes utiles
1
Un prêtre de l’archidiocèse de Gênes s’adresse à la CDF par une lettre
datée du 18 mai 1984 concernant la position
de l’Église sur l’œuvre de Maria Valtorta. Le cardinal Ratzinger répond
personnellement par une lettre datée du 31 janvier
1985, à l’archevêque le cardinal Giuseppe
Siri, dont dépend
le prêtre requérant. Voici l’original en
italien de la phrase citée : « Benché abolito, l’Index conservava tutto il suo
valore morale, per cui non si
ritiene opportuna la diffusione e raccomandazione di un’Opera la cui condanna
non fu presa alla leggera ma dopo
ponderate motivazioni al fine di neutralizzare i danni che tale pubblicazione
può arrecare ai fedeli piú sprovveduti. »
2
« Je vous demande, dans le cas d’une éventuelle réimpression des
volumes, qu’il soit indiqué clairement dès
les premières pages que les « visions » et les « dictées » auxquelles on se
réfère dans ces volumes ne peuvent être
reconnues d’origine surnaturelle, mais qu’elles doivent être considérées
simplement comme des formes littéraires
dont l’auteur s’est servi pour conter, à sa manière, la vie de Jésus. »
(Dionigi Tettamanzi, Secrétaire général de la Conférence Episcopale Italienne,
Lettre à l’éditeur, 6 mai 1992)
3
Citation de Benoît XVI, Verbum
Domini, n°14 4 1 Jn 1, 2-3
5 Cette réflexion est inspirée de ce que dit Benoît
XVI, dans Verbum Domini n° 13 6 Citation Dei Verbum n°
8
7 Citation
Dei Verbum n° 8
9 Citation Dei Verbum n° 8
10 Citation Dei Verbum n° 8
III.
Trois articles
de Don Guillaume Chevallier
Guillaume Chevallier : prêtre de la communauté
Saint-Martin, professeur d’exégèse à
l’École supérieure de Philosophie et de Théologie
d’Évron.
L’inspiration chez Maria Valtorta. Discerner
l’origine de l’Évangile tel qu’il m’a été révélé
https://www.communautesaintmartin.org/wp-content/uploads/2021/03/DGC-Charitas-14-Linspiration-
Contenu de l’article :
I. « L’ADIEU
À L’ŒUVRE » : UNE CONCLUSION
QUI CERTIFIE L’INSPIRATION DU LIVRE — II. CONTESTATIONS ET CORRECTIONS DU TEXTE CANONIQUE
— III. UNE MALADROITE TENTATIVE
DE LUTTER CONTRE « LE MODERNISME » — IV. UN AUTEUR
OMNIPRÉSENT ET PLUS QUE SACRÉ — V. UNE CONCLUSION IMPRÉCATOIRE
Extrait de la conclusion :
Il est impossible de séparer dans l’œuvre de Maria
Valtorta les narrations avec leurs
discours explicatifs, les dictées, les déclarations sur l’inspiration
miraculeuse de l’Œuvre, les exhortations divines
à ajouter foi à l’ensemble, la révérence dûe à l’auteur. L’Œuvre elle-même refuse d’être
lue comme « une vie romancée » – qui pourrait
avoir son intérêt en laissant une place au discernement et à l’interprétation. Elle réclame, avec menaces, d’être lue
comme un texte prophétique, dont nous avons
vu à quel niveau d’excellence et à quelle utilité pour le salut il
prétend, et pour cette raison ne peut
s’interpréter que par les codes
qu’elle fournit.
L’abus spirituel est patent. L’autorité de l’Évangile de Valtorta,
malgré quelques précautions rhétoriques, minimise celle des Apôtres
et de l’Église. Elle
construit
un climat spirituel de défiance à l’égard de l’autorité légitime, chargée de discerner les prophéties, et au lieu de se soumettre à la règle commune et apostolique exprimée
par le Canon, c’est le Canon qu’elle
juge, complète et perfectionne.
Pour ces raisons, il est évident que la mise à l’Index
autrefois de l’œuvre de Valtorta
était justifiée. Avec un peu de surprise, on constate que la condamnation de 1960 pointait seulement, avec quelques « perles qui ne brillent
pas par leur orthodoxie », des fautes de goût, des incohérences, des erreurs et un style prétentieux.
L’auteur de cette critique avait-il eu connaissance des passages les plus explicites sur l’ambition de l’Œuvre ? Il
aurait probablement été amené à fustiger, plus
que la comparaison à Dante, l’orgueilleuse volonté de « s’asseoir sur le trône
de Dieu ». Cette prétention
autoritaire est, pour l’Église fondée sur les Apôtres et leur témoignage seul, inacceptable.
Un faisceau d’indices
remet sérieusement en cause l’origine
surnaturelle de L’Évangile tel qu’il m’a été révélé. Les textes font naître un malaise récurrent
en entretenant le flou et les
formules théologiquement scabreuses, plus souvent que clairement erronées. On ne peut toutefois pas souligner assez
qu’engager l’autorité de Dieu contre la règle ecclésiale est un
procédé mensonger.
Évaluation
de trois éléments de doctrine de l’Évangile tel qu’il m’a été révélé,
de Maria Valtorta
https://www.communautesaintmartin.org/wp-content/uploads/2021/03/G.CHEVALLIER-MV-II-
EVALUATION-DES-ELEMENTS-DE-DOCTRINE.pdf
Contenu de l’article :
1. La préexistence de Marie — 2. L’incarnation de Satan en Judas — 3. L’incarnation du Verbe divin
Extrait de la conclusion :
« Avec cette œuvre, on n’a rien ajouté à la révélation »,
affirme « Jésus » dans la conclusion de L’Évangile
tel qu’il m’a été révélé (X, 38, 304). Les deux premiers
exemples que nous avons analysés montrent à l’évidence le contraire : la création antécédente de l’âme de Marie, séparément de son corps, et
l’enseignement sur l’incarnation de
Satan en Judas sont de réelles nouveautés, qui découlent d’une vision très manichéenne de l’univers
spirituel. Le troisième exemple,
celui des affirmations doctrinales explicites ou suggérées
sur l’Incarnation du Verbe témoignent, plus que de maladresses
d’expression, d’une perception de l’union de
Dieu et de l’homme très confuse.
Loin de l’équilibre des formulations théologiques
conquis de haute lutte pour préserver
l’intégralité du donné révélé, les
expressions mises sur les lèvres des personnages, ou plus grave, de Jésus lui-même, dès lors qu’elles
ne sont pas recopiées par
Maria Valtorta dans les Évangiles ou dans la Tradition, mais forgées par elle, sont souvent
fausses. Les deux mystères de la consubstantialité du Verbe au Père (et de leur commun vouloir, de
leur commune opération) et de l’union de la nature
divine et de la nature humaine dans le Christ, avec leur coopération, sont loin d’être
compris et exprimés
selon la foi de l’Église dans l’œuvre de Maria Valtorta.
Aspects psychologiques des personnages de L’Évangile tel qu’il m’a été révélé de Maria Valtorta
https://www.communautesaintmartin.org/wp-content/uploads/2021/03/G.CHEVALLIER-MV-III-
ASPECTS-PSYCHOLOGIQUES-DES-PERSONNAGES-.pdf
Contenu de l’article :
1. La personnalité narcissique du « Jésus » de Valtorta est celle d’un gourou — 2.
«
Jésus » et sa mère : des relations mère-fils d’une étouffante possessivité — 3.
« Jésus
» face à Judas : passionnel et victimal — 4. Amour
possessif — 5. Gestes ambigus
— 6. Le dévoiement du langage
de l’union mystique
Extrait de la conclusion :
L’œuvre de Maria Valtorta
nous met en présence d’une forme particulière d’abus spirituel, à deux niveaux. D’abord, dans le domaine
proprement religieux. Malgré quelques
précautions littéraires, le texte atteste – mensongèrement – d’un processus de rédaction d’origine divine
qui permet de le comparer, voire de le substituer, à la révélation authentique. Ensuite, dans le domaine
spirituel et psychologique. Le personnage de « Jésus »
prodigue une éducation et tisse des relations
toxiques avec les personnages du roman et, à travers eux, avec le lecteur ou la lectrice consentants. Même s’il
était avéré que les informations de nature historique,
géographique ou archéologique que prodigue Valtorta dans son Œuvre étaient
exactes, cela ne justifierait pas pour autant la formation
qu’elle prétend donner aux maîtres
spirituels et aux âmes, qui sera, en fonction du degré de perméabilité des lecteurs,
soit sans réel intérêt, soit
dangereuse.
Il conviendrait de demander à un spécialiste d’analyser les sources
possibles de la création du personnage littéraire de «
Jésus », une fiction qui veut s’imposer, au-
delà de la fiction, pour réalité divine. Ce Maître, qui s’impose par son
verbe, qui interprète tout, autorise et défend ce qu’il veut, se soumet
les êtres, présente
des traits qui, si on les
rencontrait dans la vie ordinaire ou chez un Maître spirituel, ne seraient
pas acceptables. De quelles
projections affectives, de quel besoin de domination ce personnage fantasmé
de « Jésus » est-il le produit
? Si nous pouvions hasarder
une hypothèse, nous évoquerions une immaturité affective
transposée en termes religieux, trouvant ainsi une auto-justification
absolue. Un indice de cela se
trouve peut-être dans cette très étrange définition de Dieu que l’on trouve dans l’Œuvre : « Dieu est l’amour devenu Dieu » (II, 54, 293). L’expression indique un processus de divinisation d’un
amour préexistant : il est tentant d’y lire que
l’amour tel que Valtorta le conçoit,
alliant la recherche de la fusion avec l’autre et d’une pureté irréelle,
d’une sensualité qui ne veut pas s’avouer,
a été par elle divinisé,
devenant normatif, explicatif, et
finalement idolâtré.
IV. Maxime Lesage, ex-fervent valtortiste
1.
Son témoignage publié sur le site sosdiscernement.org
J'étais un fervent défenseur de l'oeuvre de Maria
Valtorta (MV), trouvant l'article de
la mise à l'Index plus en faveur de MV que contre. J'ai passé 4 ans à en faire
la nourriture de mon âme. J'ai voulu
lire les articles de Don Guillaume Chevallier
comme une épreuve pour vérifier la solidité de l'EMV (évangile de Maria
Valtorta), car de mon côté, mes
recherches m'avaient souvent permis de lui donner raison plutôt que tort. J'en avais développé une confiance en l'oeuvre
qui était plus de la fascination
qu'autre chose. Chaque fois qu'un doute se présentait, j'essayais de lui trouver
une solution probable,
par bienveillance, mais tant que ce n'était
pas lourdement problématique,
je passais outre sans examen approfondi. J'ai ainsi bien travaillé sur la question du péché originel dans l'oeuvre, en
revanche, pour le côté neoplatonicien
de la création des âmes, j'ai renié mon thomisme en pensant avoir à faire à plus érudit que moi, ne pensant
pas que la création de l'âme en dehors du corps était une opinion réprouvée
par l'Eglise.
Un jour, on m'a parlé des articles de Don Guillaume
Chevallier. J'avoue qu'une lecture
rapide de ses articles me laissait plutôt sceptique, j'avais l'impression d'une certaine
mauvaise foi de sa part, surtout sur les aspects
psychologiques des personnages, étant donné qu'il avait fait
un contresens complet sur ce qu'est un pervers
narcissique (cela correspond parfaitement au Judas de MV et pas du tout à son Jésus) et que je ne pensais pas que
l'EMV pouvait induire un prêtre à commettre des
abus physiques à cause du rappel fait aux prêtres de rester chaste. J'ai changé d'avis depuis car "tout est pur pour
les purs, mais pour ceux qui sont souillés et qui refusent de croire, rien n’est pur : leur intelligence, aussi
bien que leur conscience, est souillée"
(Tite 1:15)... Bref, j'ai mis les articles de Don Guillaume Chevallier dans un coin de ma tête avant d'y revenir pour
répondre aux objections, parce que certaines
me paraissent fortes et que si une chose est vraie, elle résiste à
toutes les objections, même les plus
redoutables. De plus, il y avait un côté stimulant à lutter contre un adversaire de taille plutôt que les
critiques d'une fragilité étonnante (mise à l'Index), voire d'une nullité affligeante (Dominicains d'Avrillé qui font
des contresens sur le texte)...
En travaillant sur le premier article au sujet de
l'inspiration de l'oeuvre, première prise de conscience, il n'y a pas de "désormais" (ou de "de
plus" si on regarde l'italien) aux noces de Cana comme le prétend
le Jésus l'EMV,
avec une lourde
insistance dessus. J'ai bien regardé
dans les manuscrits grecs présents sur le CSNTM,
ainsi qu'un synopsis
des versions de la Vetus Latina dans St Jean. Cela m'a surpris de voir qu'il n'y a aucune variation du texte sur 40 manuscrits différents dont
une grande partie est antérieure au 5e siècle ! Cela
étant d'une rareté exceptionnelle, c'est
qu'il y a une certitude sur la fidélité de ce "quid est tibi et
mihi Mulier / ti emoi kai soi Gunai". Une erreur attestée,
c'était suffisant pour que je puisse me dire : "s'il y a une seule erreur,
alors peut-être que les passages
où j'ai interprété en faveur
de l'oeuvre sont faux". J'ai donc repris de
vieux doutes à ma première lecture et j'ai trouvé des contradictions entre plusieurs passages, soit de l'EMV, soit des
Cahiers de MV. J'ai retrouve aussi
des différences notables avec les évangiles qu'on ne peut pas attribuer à une légèreté de l'évangéliste (les
morts qui ressuscitent à la Passion dans l'EMV au lieu d'après la résurrection comme en Mt 27, 53 - c'est
invraisemblable de penser que St
Matthieu se soit trompé sur ce détail si peu banal). C'était sûr, MV avait cédé
à Satan, soit au départ, soit à un
moment tardif... Ou alors elle a tout inventé. Je n'avais pas encore d'opinion ferme à ce sujet,
mais je savais que le mal avait contaminé les
écrits de Maria
Valtorta, je ne pouvais donc plus avoir une confiance absolue en eux.
J'ai enfin travaillé d'avantage sur les trois éléments de doctrines chez Maria Valtorta de Don Guillaume Chevallier, et là
c'était clair, j'étais passé complètement à côté de grosses hérésies ! Cela m'a choqué de ne pas l'avoir vu alors
que j'étais tout à fait capable de
savoir que c'était hérétique au regard de mes connaissances en théologie ! Je suis passé à côté de ces passages, en
leur attribuant un sens métaphorique, ou en les interprétant favorablement (le langage
de l'EMV est souvent confus),
mais pourtant je les ai lus et
bien trop rapidement la première fois. Grande humiliation pour moi, mais salutaire humiliation pour
écraser l'orgueil de mon intelligence. Puis j'ai
retrouvé cette dictée du 16 août 1949 dans laquelle le Jésus de MV affirme qu'il n'y
a aucune erreur dogmatique dans l'oeuvre... Un tel mensonge qui intervient une fois que presque toute l'oeuvre de
Maria Valtorta a été écrite ! Cela m'a décidé à m'éloigner totalement des écrits de MV, même si j'avais trouvé
certains passages très nourrissant pour ma vie spirituelle (par exemple, le commentaire sur les trois
tentations au Gethsemani). C'était clair, Satan cherchait à nous faire
tomber dans l'erreur en nous faisant
croire à un faux Christ qui dit occasionnellement des hérésies, dans un langage
obscur. La réalité
montre que beaucoup
se laissent tromper sans vigilance, je le sais car
j'ai participé à un forum dédié à Maria Valtorta, et mon épouse avait fondé un groupe de lecteurs de Maria... Nous
connaissons donc en partie le milieu
des "valtortistes", et je dois avouer que même lorsque j'étais valtortiste, j'étais gêné par un aspect
fanatique qu'on retrouve chez les plus ardents
défenseurs de Maria Valtorta.
Aujourd'hui je ne retiens qu'une seule chose de cette
expérience : "Il surgira des faux messies
et des faux prophètes, ils produiront des signes grandioses et des prodiges, au point d’égarer, si c’était possible,
même les élus" (Mt 24, 24). Or
il est évident qu'on ne peut pas
égarer des élus, si ce n'est avec ce qui imite la vérité, la foi et la vertu mais sans l'être réellement. Voilà pourquoi je me méfie
énormément des détails scientifiques qui, paraît-il,
sont exacts. Quand je pense qu'un clerc sérieux comme Mgr Laurentin (du moins je le juge tel) n'a pas vu les
erreurs doctrinales, je me dis que cette
oeuvre est très dangereuse et qu'il est nécessaire que l'Eglise en fasse
une condamnation bien plus claire et bien plus sévère. J'espère sincèrement que la commission doctrinale de la CEF
pourra publier une note bien plus fournie que ce qu'elle a publié à ce sujet, c'est, il me semble, une nécessité
pastorale importante. J'ai une
formation philosophique solide et des notions importantes en théologie. Si donc les écrits de MV ont été si dangereux pour
moi comme pour beaucoup de clercs pourtant
plus savants que moi, ils le sont encore plus pour le fidèle ordinaire qui est désarmé face à eux et qui n'entend pas les
arguments théologiques aussi bien. C'est même
pire que cela, beaucoup de lecteurs assidus refusent de voir l'évidence des hérésies même quand on leur commente les
multiples passages incriminés sous les yeux...
Ainsi, je n'ai pas peur de le dire, les écrits de Maria Valtorta produisent
chez certains lecteurs une forme grave de fanatisme, et je peux le dire car je l'ai été partiellement moi aussi !
Je continue sur la conclusion de l'article de Don Chevallier sur l'aspect psychologique des personnages. Il a
parfaitement raison, il faut se débarrasser de
tout ce que l'imagination à recueilli en lisant MV. Moi qui suis dans
cette situation, je peux vous
assurer que c'est une poisse épaisse et bien collante qui ne sort pas si facilement de mon esprit ! Chaque passage
des évangiles, chaque enseignement a sa description
propre dans l'EMV, ainsi la contamination est presque totale ! Parfois on ne sait plus très bien ce qui est de l'EMV ou ce qui est des évangiles canoniques, alors il faut reprendre à zéro... Heureusement les évangiles ne
sont pas si longs que ça à lire ! Plusieurs fois j'ai douté en me disant que j'étais en train de devenir "un
maître chicaneur" condamné
par l'oeuvre (il faut dire que c'est un thème
récurent). La seule façon que
j'ai de lutter est de fixer régulièrement mon regard sur les erreurs qui ont été mises en lumière afin de me
persuader que c'est bien vers la lumière de la
vérité que je marche et que j'ai bien raison de laisser tomber l'oeuvre
de MV dans l'oubli. Maintenant que
quelques semaines sont passées, et que j'ai travaillé au moins 60 heures sur la recherche minutieuse
des erreurs par rapport à mes souvenirs, il est plus facile de me persuader que Maria Valtorta est une fausse
mystique... Mais figurez-vous que
j'en doute encore parfois ! Alors je reprends mes travaux dont j'ai fait une synthèse,
je les relis et je retrouve la paix : décidément, une vraie mystique
ne pourrait pas dire de telles hérésies. Dieu ne peut pas donner
quelque chose d'hérétique qui viendrait donc détruire la foi !
Après tout cela, la reprise
d'une vie spirituelle normale est compliquée. Au départ, c'était une
forme grave d'acédie qui me minait. Il y avait aussi les larmes de repentir, adoucies par la bonté de Dieu
qui me faisait sentir qu'il avait pitié de moi. J'ai pleuré d'avoir soutenu avec force devant mes amis qu'il n'y
avait aucune erreur chez Maria
Valtorta. J'avais soutenu fortement une oeuvre avec des hérésies graves ! Je leur ai donc écrit que je m'étais
trompé sur Maria Valtorta et eux m'ont pardonné. Lire Maria Valtorta
donnait une nourriture facile à l'imagination, maintenant qu'il faut reprendre la lecture de la Bible,
le travail intellectuel est plus difficile, mon esprit est devenu paresseux... Refaire oraison sans le matériau
de l'EMV, c'est laborieux. Et
puis les passages qui m'ont touché, je ne les garde pas non plus. Quand nos ancêtres chrétiens devaient passer
du paganisme au christianisme, ils brûlaient
leurs idoles entièrement ! C'est ce choix que j'ai pris, parce que je ne
veux rien garder de ce que je crois venir
de Satan, même s'il me donnait une bonne chose dans l'absolu pour mieux me tromper ensuite
(l'EMV, c'est une tentation sous apparence de bien comme le dit St Ignace, ici Satan ne cherche pas à tromper
le pécheur impénitent, mais celui qui cherche
sincèrement le Christ - je dis cela après avoir fait un travail minutieux, pas seulement en réaction à mes fautes).
Mais après cela, quelle joie de
pouvoir de nouveau lire la Bible et l'interpréter de mille manières
différentes, contrairement à l'EMV qui est tellement
concret qu'il laisse peu de place à l'interprétation.
Enfin je peux de nouveau écouter un
sermon à la messe sans avoir cette
arrière pensée orgueilleuse : « s’il avait lu Maria Valtorta, il n'aurait pas
dit cela, il aurait mieux compris ». Plus
besoin de faire une gymnastique intellectuelle
pour écouter un prêtre disant quelque chose de pertinent même s'il ne va
pas dans le sens de l'EMV.
Douloureux détachement de l'EMV, parce qu'il faut faire l'effort de retravailler, mais joyeux détachement avec le sentiment
d'être "enfin libre" ! Libre par rapport à tous ces passages
culpabilisants de l'EMV ou des Cahiers, et ils sont nombreux en fait
quand on regarde vraiment bien.
Dans ma tristesse, j'ai été réconforté par cette béatitude
du Christ : heureux ceux qui croient sans avoir vu (Jn 20,
29). J'avais l'impression de voir le Christ avec les écrits de Maria Valtorta, je cherchais à
connaître le Christ dans les moindres détails pour mieux l'aimer. C'est sans doute cette curiosité
qui m'a perdu, car je cherchais à connaître
des choses au sujet du Christ que la Sainte Trinité n'a pas voulu révéler. En effet, j'ignorais qu'au n°11 de Dei
Verbum, il est dit que les Ecritures
Saintes ne contiennent que ce que
Dieu veut, et cela seulement. Ainsi les disparités entre évangiles, les zones d'ombres
aussi, tout cela est voulu par Dieu et doit être reçu avec
piété et humilité, au lieu de tomber dans la critique des instruments de Dieu
qui ont mis par écrit sa parole
(attitude récurrente des valtortistes, et pour cause, elle est défendue dans l'EMV). Ainsi, je suis tombé dans le plus antique péché : celui de désirer une connaissance dont le Seigneur
nous prive volontairement pour notre bien.
Désormais, je peux me réjouir de croire à nouveau sans voir et c'est
vraiment une très grande joie ! (Le témoignage est publié dans les commentaires de l’article)
2.
Son travail : «
Contradictions et hérésies dans l’oeuvre de Maria Valtorta ? »
Après avoir livré son témoignage, Maxime Lesage a
approfondi ses recherches pendant une année. Suite
à cela, il a publié un ouvrage téléchargeable gratuitement :
Contradictions et hérésies dans l’oeuvre de Maria Valtorta
?
V. René Gounon : Maria Valtorta, l’Évangile dévoyé
TÉLÉCHARGER
Extrait de l’introduction :
« Bien que
jamais reconnue par l'Eglise, cette oeuvre est toujours plus largement
diffusée, elle a été traduite dans
une trentaine de langues, est répandue dans le monde entier et toute une littérature se développe aujourd'hui
autour d'elle. Une intense activité de promotion contribue à cette expansion, comme en témoignent les multiples
ouvrages et vidéos à la gloire de
l'oeuvre et de son auteur. Cette œuvre extraordinaire dont l'Eglise conteste absolument l'origine
divine a aujourd'hui pignon sur rue, on trouve ce soi-disant « Evangile »
et les livres qui s'y rattachent sur
les rayons des librairies catholiques et jusque dans certaines librairies généralistes. Il est donc
naturel de s'interroger. »
VI. Joachim Bouflet : les aspects
problématiques
Là où Joachim Bouflet ne consacrait que quatre pages à
Maria Valtorta dans sa somme au titre
explicite, Faussaires de Dieu (2000),
c’est cette fois un chapitre entier et fourni qu’il dédie à la « mystique »
italienne dans son dernier opus Impostures mystiques paru en mars 2023. Les
articles de Don Guillaume Chevallier publiés en 2021 dans la revue Charitas, les réponses « aussi peu argumentées que violentes, voire haineuses » (p. 139) qui lui ont
été faites, et le « bref avertissement » de la
Commission doctrinale des évêques de France paru en septembre 2021, qui
relève que « la diffusion des écrits de Maria Valtorta
s’intensifie depuis deux ans au moins
», ont conduit Joachim Bouflet à se plonger dans les quelque 5000 pages de l’Évangile
tel qu’il m’a été révélé et ses Cahiers,
avec comme il le dit « une patience de chartreux
» devant « la mièvrerie et le sentimentalisme du texte ». Si Joachim Bouflet s’appuie à plusieurs reprises sur les
travaux de Guillaume Chevallier et rappelle les nombreuses condamnations de l’œuvre par l’Église, reproduisant
in extenso l’article de l’Osservatore Romano intitulé « Une vie de
Jésus mal romancée » faisant suite à la mise
à l’index de 1960, il n’en apporte pas moins sa contribution personnelle aux aspects
problématiques de l’œuvre de Maria
Valtorta.
Par Damien Bally
De nombreux anachronismes
Il relève en premier lieu les nombreux
anachronismes qui émaillent
l’œuvre, alors même que le président de la Fondazione Maria Valtorta ne craint pas
d’affirmer dans une conférence de 2018 que « la science archéologique confirme tout ce qui est écrit
dans les dix volumes de l’œuvre ». (p. 96)
Hélas, certains détails ne résistent pas à l’examen critique,
comme ces « coupoles
resplendissantes » du
Temple de Jérusalem mentionnées à plusieurs reprises par Maria Valtorta qui n‘ont
jamais existé que dans son
imagination féconde : tant les fouilles archéologiques menées dans les années 1970-1980, que les descriptions de l’historien juif Flavius Josèphe
au 1er siècle de l’ère chrétienne démentent l’existence de
ces coupoles, qui d’ailleurs ne font leur apparition
qu’au milieu du 1er siècle dans le monde romain, mais pas chez les juifs qui préfèrent les toits en terrasse, puis plus tard dans l’architecture arabo- musulmane.
Autre étrangeté, l’utilisation par Joseph et Jésus d’un tournevis
pour leurs travaux
de menuiserie, outil totalement inconnu
jusqu’à la Renaissance qui voit l’invention de la vis de fixation. Ou
encore la présence dans le récit de plantes importées
du Nouveau Monde au XVIè siècle : « tous ces anachronismes en termes de végétation équivalent à faire cultiver
par les contemporains de Jésus des pommes de terre,
des tomates ou du maïs »
commente ironiquement Joachim
Bouflet.
Dans une veine toute romanesque, Maria Valtorta conte
aussi que Jésus, âgé de 5 ans, réfugié
avec ses parents
en Égypte, cherche
à reproduire un petit lac à l’image
de celui de Génésareth pour y faire flotter ses petits bateaux
faits de feuilles
mortes. Il place les villes
bordant le lac : Magdala, Capharnaüm et… Tibériade.
Problème : la ville de Tibériade n’a été fondée qu’en l’an 17, date à laquelle
Jésus avait une vingtaine
d’années.
La description des sacrements
Les descriptions faites par Jésus des sacrements de l’Église sont tout aussi anachroniques. Bien que leur nombre définitif
n’ait été arrêté qu’en 1274 par le Concile
de Lyon (entériné par le Concile de Trente en 1547), les sept sacrements sont institués par Jésus en personne dans
l’Évangile revisité par Maria Valtorta. (p. 124) Dans un long dialogue avec l’apôtre Jacques,
« Jésus », après avoir
pris soin de
définir ce qu’est un sacrement, dans des termes
qui semblent tout droit sortis d’un catéchisme,
détaille chacun avec un luxe de précisions qui n’appartiennent qu’à la tradition
chrétienne ultérieure.
Après avoir donné ses instructions concernant le baptême,
l’absolution des péchés, l’extrême-onction des malades,
Jésus codifie également le « Sacrement
pour les noces de l’homme », autrement
dit le mariage dont les modalités n’ont été fixées que progressivement, notamment par le IVè concile du Latran en
1215. De même le sacrement de confirmation dont « Jésus » dit qu’il
sera donné « par ceux qui auront reçu la plénitude du sacerdoce
». Or baptême et confirmation étaient conférés ensemble dans l’Église primitive avant
qu’en 416 le pape Innocent Ier confie aux seuls
évêques la prérogative de confirmer les baptisés. Le « Jésus » de Maria
Valtorta institue également une « hiérarchie ecclésiastique » comme
elle le lui fait dire. C’est donc,
selon le mot de Joachim Bouflet, une « Église clefs en main » que livre Jésus. Plus gênant, l’explication de chacun des sacrements dont l’apôtre Jacques
est le dépositaire en tant que « chef de l’Église d’Israël » (sic) est
faite par Jésus sous le sceau du secret, selon un mode de transmission caractéristique d’une
gnose.
La personnalité de Jésus
La personnalité de Jésus dans l’œuvre de Maria Valtorta,
décrite par Don Guillaume
Chevallier comme celle d’un gourou autoritaire et égocentrique revêt un aspect plus inattendu dans l’analyse que
tire Joachim Bouflet de certains passages de
l’œuvre : celle d’un « Jésus »
homo-sensible qui aime « à embrasser, caresser et étreindre ses disciples
hommes » (p. 115) Ainsi le troublant
baiser que dépose
« Jésus » sur la bouche d’un certain Abel
de Bethléem, personnage assimilé dans l’œuvre à Saint
Ananie.
Le plus favorisé étant sans surprise « le disciple que Jésus aimait » de l’Évangile dans cette scène racontée par Maria Valtorta.
Réveillé un matin par un baiser de Jésus
sur la joue, Jean, qui « ne porte que ses sous-vêtements », se jette à son cou
et se déclare « enflammé d’amour » pour Jésus qui « brûlant
d’amour à son tour le caresse
». Un peu confus de tant de fougue amoureuse, Jean fait promettre à Jésus le silence sur cet épisode intime et s’entend
répondre : « Sois tranquille, Jean, personne
ne saura rien de tes noces avec l’Amour ». Un « Jésus » manipulateur, commente Joachim
Bouflet, qui enferme son disciple dans le secret d’une relation équivoque dont il
est l’initiateur.
Cette scène se prolonge dans
d’autres effusions scabreuses au fil des chapitres de l’œuvre, toujours dans le secret et à l’écart des autres
disciples : « Et Jésus reconnaît son
Préféré. Il lui tend les bras et Jean s’y élance […] à peine vêtu avec sa
tunique humide, déchaussé, glacé.
"Tu as froid Jean ! Viens ici sous mon manteau…" […] Ils restent
enlacés dans le seul manteau
de Jésus. ». Ou encore
au chapitre suivant
:
« Ainsi
tu es venu. Cela nous sert,
à toi et à Moi, à jouir
d’un moment d’amour »
Mais, «
nouveauté ignorée des Évangiles
», commente Joachim Bouflet, le disciple le plus aimé n’est en réalité pas
Jean mais Judas comme Maria Valtorta le fait
dire à Jésus dans ses Cahiers, un
Jésus qui va jusqu’à supplier son Père que ce ne soit pas Judas qui « a dormi sur ma poitrine […] mon ami, mon
apôtre » qui le trahisse. L’apôtre Jacques est également poursuivi par les
assiduités de Jésus : « […] "Je
te baise sur ta bouche, qui devra répéter ma parole aux gens d’Israël, et sur
ton cœur qui devra aimer" […] Ils restent
embrassés longuement et Jacques paraît s’assoupir
dans la joie des baisers de Dieu » Autant de scènes homo-érotiques qui siéent
mal à la relation, même privilégiée,
de Jésus avec ses disciples.
L’entrevue du 26 février 1948 avec Pie XII
Joachim Bouflet apporte
également des précisions utiles sur l’entrevue du 26 février 1948 avec Pie XII, en présence des frères servites
de Marie, les pères Romualdo Migliorini, directeur spirituel
de Maria Valtorta qui l’avait encouragée à écrire ses visions, son confrère Corrado Berti, enthousiasmé par les « dictées » de la
« mystique », et leur supérieur le père Andrea
Cecchin. Le pape aurait déclaré :
« Publiez l’œuvre telle quelle. Il n’y a pas lieu de donner une opinion
quant à son origine, qu’elle soit extraordinaire ou non. Ceux qui liront comprendront » Or, c’est le
père Berti seul qui rapporte ces propos, avancés comme argument d’autorité par les partisans de Maria Valtorta.
Comme le dit l’adage, testis unus, testis nullus.
D’autant que le témoignage du père Berti « qui au fil des années
s’est montré de plus en plus exalté pour Maria Valtora
» (p. 128) allant même jusqu’à recourir
à un
radiesthésiste
pour démontrer que la mystique
disait la vérité
au sujet du tombeau de Saint
Pierre, est largement sujet à
caution.
De son côté, le père Checcin indique seulement que le
pape leur a demandé de trouver un
évêque pour l’imprimatur d’usage. Imprimatur qu’obtiendra à l’été 1948 le père Berti pour un livret de 32 pages,
maquette de L’Évangile tel qu’il m’a été
révélé, de la part de Mgr
Barneschi, évêque in partibus, c’est
à dire sans diocèse propre à gouverner.
Or cet imprimatur, que les partisans de Maria Valtorta mettent en avant, ne peut être accordé que par l’ordinaire
du lieu où réside l’auteur et/ou l’éditeur de
l’ouvrage, il n’a donc en l’espèce aucune autorité.
La personnalité de Maria Valtorta
Joachim Bouflet aborde enfin la personnalité de Maria
Valtorta à travers ses écrits autobiographiques. Il note (p. 134)
« l’absence de la joie et de la paix caractéristiques
de toute authentique expérience mystique » Devant le manque de soutien apporté à son œuvre, elle se pose
en victime incomprise de tous,
vindicative envers les servites de Marie (dont elle est membre du Tiers-Ordre) qui selon elle l’ont trahie. Ainsi elle fait dire à Jésus que le père Migliorini, adepte pourtant de la première
heure, est « un parâtre
et un tentateur ». Servites
qu’elle qualifie en 1949, au moment où le Saint-Office examine les textes et interdit
leur publication, de
«
rebelles, orgueilleux, menteurs,
fraudeurs, tentateurs d’une âme, dépréciant la Madone, coureurs
de jupons… » Contrairement aux trois mystiques
données en exemple par Joachim Bouflet, qui
montrent un grand détachement vis-à-vis de leurs écrits, Maria Valtorta
défend bec et ongle son œuvre, constituant même pour cela un dossier avec l’aide d’un avocat…
Elle ne trouve sa consolation que dans les paroles de Jésus qui lui déclare
notamment : « Aucune âme ne m’a autant vue que toi »
et l’appelle son « petit Jean » martyrisé.
Ainsi apparaît-elle à ses yeux comme la plus grande voyante de tous les temps, ce qui n’est guère gage d’humilité. Saint Pie X du haut du ciel lui donne sa bénédiction, sa mère aussi,
de son purgatoire, vient la réconforter. Sans nier sa
sincérité et sa piété, Joachim Bouflet
la décrit (p. 137)
comme « une femme illusionnée et s’illusionnant sur
elle-même », sans exclure cependant
chez elle des facultés paranormales sous
la forme de « prémonitions » et autres « faits étranges » évoqués
par l’auteur anonyme de Maria Valtorta, la persona e gli
scritti.
En conclusion, plus qu’à Maria Valtorta elle-même,
Joachim Bouflet attribue la fraude à
ce que l’historien Yves Chiron qualifie de lobby valtortiste qui, à grand renfort de « contre-vérités » et d’«
expertises prétendument scientifiques effectuées par divers "spécialistes" auto-institués », continue
de défendre le caractère surnaturel des dictées
et visions de Maria Valtorta.
VII. L’antisémitisme présent dans le Poème
de l’Homme-Dieu
Article publié
dans The Catholic Word Report (14 septembre 2021),
sous le titre : « Un monument
de pseudo-religiosité ». Réquisitoire contre le Poème de l’Homme-Dieu. Traduction de l’anglais
: D. Auzenet, avec l’aide de Linguee. La totalité de cet
article se trouve sur le site sosdiscernement.org. Je ne
reproduis ici que le point 4 de l’article qui aborde la question de l’antisémitisme.
« La pire faute de
Valtorta est son déplorable antisémitisme, à la fois religieux et racial, qui entache tout le Poème. Opposés aux soldats romains,
les lâches basanés, puants et à gros nez de Valtorta
sont des stéréotypes tout droit sortis de L’éternel
juif. Pour les Romains, les cadavres juifs sont "autant de serpents en moins". (V : p. 623) Les légionnaires insultent
allègrement la foule juive qu’ils dispersent à
coups de poing. (IV
: p. 804) La confrontation de Pilate avec une délégation du Sanhédrin est un
exercice embarrassant de comédie vulgaire, Pilate reniflant une fleur pour éloigner
l’odeur de "bouc" des
Juifs. (V : pp. 557 et suivantes).
Valtorta compare à plusieurs reprises les Juifs aux
Romains : "Les utérus hébreux conçoivent de vils parjures. Les utérus
romains ne conçoivent que des héros." (V : p. 790) Marie Salomé qualifie les Juifs de "lâches" mais considère leurs
conquérants romains comme "justes et pacifiques". (V :
p. 652) Marie-Madeleine suppose
que les Juifs convertis ne
seront pas assez courageux pour être martyrs. (V : p. 663) Les païens seront de meilleurs disciples de Dieu
qu’Israël ne l’était. (V : p. 852) Il est significatif que le récit de la Pentecôte de Valtorta ne culmine pas avec la
conversion de 3 000 juifs. En supposant que les premiers
chrétiens ont immédiatement changé leur sabbat pour le dimanche, elle n’est pas
consciente de la lente distanciation de la synagogue et de l’Église relatée dans les Actes des Apôtres.
Marie s’emporte en disant que Rome avait raison de craindre cette "tribu
de tueurs". (V : p.
642). Elle déclare : "Je ne suis
plus une Juive, mais une Chrétienne, la première
Chrétienne. Un personnage juif fictif se convertit parce que "le culte d’Israël est devenu du satanisme" et rompt
promptement le sabbat. (V : p. 673). Nicodème, qui s’est débarrassé de son identité hébraïque, projette de sculpter
une statue, la future Sainte Face de Lucques. (V : p. 903)
Plus grave encore, Valtorta fait des Juifs des
Déicides. Les Romains ne sont pas responsables
de la crucifixion, seul Pilate l’est. À part les disciples du Christ, "tout le peuple juif réuni à Jérusalem voulait sa mort". (V : p.
293). La ville entière se déverse pour
railler Jésus comme des milliers de "hyènes
enragées" (V : p. 566). Longin et les
soldats romains tentent de minimiser ses souffrances, mais des bourreaux
au "profil juif évident" (V : p. 563) flagellent le Sauveur et le
clouent au sol. La supplication du Christ "Père, pardonne-leur, car ils ne savent
pas ce qu’ils font" semble
s’adresser aux voleurs
qui se chamaillent, et non à ‘ses
diaboliques persécuteurs juifs’.
À l’approche de sa Passion,
Jésus se plaint de la résistance des Juifs à la conversion : "Qu’il est pénible d’être si près de la mort pour si peu de
gens". (V : p. 64) Il déteste le culte juif : "Je déteste
vos solennités qui ne sont que des apparences. J’abolirai mon alliance avec la souche de Lévi…." (V : p. 426).
Plus tard, le Christ ressuscité déclare que
Dieu s’est retiré des rites juifs et que le judaïsme est "mort pour toujours". "Ses rituels ne sont que des gestes que n’importe quel histrion
pourrait mimer sur la scène d’un amphithéâtre."
(V : p. 831) Il méprise Jérusalem comme le lieu où la synagogue a reçu le blâme de la répudiation de Dieu pour ses nombreux et horribles crimes."
(V : p. 869) Citer des malédictions éternelles tonitruantes contre le peuple et la
terre d’Israël comme étant les paroles
mêmes de Notre Seigneur Jésus-Christ alors que les flammes de l’Holocauste brûlaient est un blasphème détestable.
Pourquoi, pendant toutes ces années,
si peu de lecteurs du Poème ont-ils
remarqué ses défauts flagrants ? Ont-ils suivi docilement les
recommandations de ceux qu’ils admiraient en tant que leaders spirituels ? Il est certain
que peu de personnes dans
l’assistance partageaient le mépris des Juifs et du judaïsme exprimé dans le Poème. Ou bien ce phénomène
démontre-t-il la théorie de la réception du lecteur : les
gens voient ce qu’ils veulent voir dans un texte ?
D’innombrables témoignages fervents
de "cette grande et glorieuse
œuvre" suggèrent que c’est peut-être le cas, d’autant
plus que les promoteurs conseillaient de la lire lentement et de manière méditative. À mon avis, le culte de Maria Valtorta a été un gaspillage tragique
de temps de dévotion, de trésor et de zèle, ainsi que de la vie
d’une malheureuse femme.
Le fait
d’avoir écrit de telles choses alors que des feux brûlaient à Auchwitz est une pure obscénité. Valtorta est un
argument unique en faveur de Nostrae aetate,
le décret de Vatican II qui a condamné la notion de culpabilité collective des juifs. »
Conclusion : une évaluation négative
Pour avoir travaillé des écrits d’autres faux
(fausses) mystiques, je suis en mesure de dire
que ces types d’écrits semblent
toujours irréprochables en première lecture.
Toutefois, lorsqu’on travaille
en profondeur, et sur la totalité de l’oeuvre, on trouve ce qui permet de dire :
non, ce n’est pas possible.
Cela est vrai pour toutes sortes d’écrits; les vôtres,
les miens : il peut toujours y avoir des erreurs, des déviances, des formulations inadaptées, des perspectives à reprendre, à redresser.
Mais lorsque les écrits prétendent avoir été dictés par Jésus lui-même en un «
livre inspiré », et donc
bénéficier d’un sceau divin, d’une inspiration divine, c’est très ennuyeux : c’est au contraire la signature d’un autre
esprit… On est donc en face d’un cas
d’abus spirituel et de tromperie.
Le travail accompli
par Don Guillaume Chevallier me semble décisif.
Il faut l’en remercier, car
s’immerger dans des écrits alambiqués et déviants, c’est faire face à une étude difficile, et spirituellement pénible
(Bienheureux confinement, cause Covid 19 !). Cela faisait plus de trente ans que j’attendais ce type
de travail critique. On peut avoir l’intuition de l’oeuvre d’un faussaire ; encore faut-il pouvoir le montrer
objectivement par une analyse théologique et en produisant les citations appropriées.
Si vous souhaitez étayer l’évaluation négative de
l’oeuvre de Maria Valtorta, je vous invite
à lire et travailler les trois articles qu’il a publiés. Vous y trouverez des
citations très problématiques… Ce ne sont donc pas seulement des réticences qu’il faut avoir devant
« l’Evangile tel qu’il m’a été révélé
»; c’est une fin de non recevoir qu’il faut lui opposer.
Les travaux
de Maxime Lesage, de René Gounon, de Joachim Bouflet, et de Sandra Miesel, dont vous avez les
références dans ce livret en sont autant de confirmations.
Collection
D’autres
titres sur le site sosdiscernement.org
ISBN 978-2-38370-018-0